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les loufoqueries du docteur Chabry
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10 mars 2012

Aux fourneaux des politiques

 

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Les amis, je souhaite aujourd’hui rendre hommage aux cuisiniers mais pas n’importe lesquels. En effet c’est à ceux qui cuisinent pour les repas dits officiels, les repas diplomatiques, les repas politiques auxquels je pense. Savoir faire un menu adéquat est souvent un casse-tête pour ces derniers. Les enjeux de ces repas sont considérables, à table, les dirigeants politiques concluent des accords commerciaux, établissent des plans de processus de paix et enterrent les haches de guerre. Il s’agit par conséquent pour ces cuisiniers hors pair de ne pas faire d’impairs (1), ou de boulettes de viande si vous préférez, car tous les chefs cuisiniers, notamment ceux des chancelleries, vous le diront, un bon repas doit d’abord, et avant tout, contribuer à résoudre des problèmes tenaces et à créer une bonne atmosphère. Il y a donc, lors de l’élaboration des menus, des choses à faire mais surtout des choses à ne pas faire.

Prenons l’exemple, si vous le voulez bien, des derniers sommets européens chargés de résoudre la crise de la dette grecque par l’adoption de plusieurs plans de sauvetage accordés en contrepartie de la mise en place en Grèce d’un plan d’austérité sans précédent (suppression de 15 000 emplois dans le secteur public en 2012 ainsi qu’une sévère réduction du salaire minimum de 20 %). Ces sommets ont, bien entendu,  donné lieu à de nombreux repas officiels réunissant les chefs d’état et de gouvernement ainsi que les ministres des finances de la zone euro. Les chefs cuisiniers ont du être particulièrement vigilants sur le choix des aliments car ceux-ci ont une signification, ceux-ci délivrent un message qui peut être plus ou moins bien perçu par les intéressés. C’est ainsi qu’il fallait absolument éviter de servir à table un petit salé aux lentilles. Ce plat là aurait eu comme conséquence fâcheuse de rappeler aux dirigeants européens que la note, pour sauver la Grèce, était particulièrement salée (130 milliard d’euros) et aurait pu faire capoter l’accord. De même qu’il aurait été particulièrement maladroit de servir à la délégation grecque des plats à base de citron (ex citrons confits). En effet ces derniers auraient alors réalisé que l’Union Européenne et le FMI (Fonds Monétaire International) n’avaient qu’un objectif en tête : les « presser comme des citrons » et là aussi l’accord aurait pu une nouvelle fois ne pas aboutir.

On le voit, faire un menu ne s’avère pas du tout simple et ce d’autant que, si il y a des choses à ne pas faire, il y a surtout des choses à faire.  Dans le cas qui nous intéresse, c'est-à-dire celui d’un repas officiel dont l’objectif est de régler la problématique de la dette grecque, il faut absolument montrer qu’il y a de l’argent, qu’il y a de l’opulence, qu’il y a une aisance financière qui permettra de résoudre la crise de la zone euro. Il faut donc rassurer les participants aux repas en leur servant des plats à base d’oseille (ex  papillote de  saumon à l’oseille) ou de blé (ex couscous). On peut également servir des épinards à l’unique condition qu’on y mette du beurre car «  mettre du beurre dans les épinards » c’est ce dont rêvent les Grecques depuis leur descente aux enfers. Enfin il ne faut surtout pas omettre de leur servir des radis car, si un tel aliment venait à être oublié, cela signifierait que les Européens n’ont plus un radis pour sauver la Grèce. Le pire c’est que même lorsqu’on croit tenir le bon plat, prenons le couscous par exemple, plat à base de blé, et bien il y a un toujours un risque, il y a toujours un piège. Vous ne voyez pas lequel ? Je vous aide. Avec quoi sert-on un couscous ? Des carottes et c’est bien là que le bas blesse. En effet en voyant les carottes les Européens, autres que les Grecques, pourraient se dire que, finalement , les carottes sont cuites et qu’il n’est, par conséquent, pas utile d’essayer de sauver la Grèce du naufrage, que son cas est aussi désespéré que celui du navire Costa Concordia. Pour ce qui est des Grecques, en voyant les carottes, eux pourraient se dire que l’Union Européenne et le FMI n’ont qu’une idée en tête avec eux : « manier la carotte et le bâton ». Pas simple les amis je vous l’avais bien dit, un véritable casse tête et ne commencez pas à me dire qu’il suffit de remplacer les carottes par les haricots (et hop le tour est joué) car ça ne marche pas. D’abord on ne met pas des haricots avec du couscous, je n’ai jamais vu çà, en outre, le message que véhicule un tel aliment est particulièrement négatif et contribuerait au fiasco du repas. En effet ne dit-on pas que c’est "la fin des haricots" ! Puisque j’en suis aux légumes et afin de ne pas faire « chou blanc » dans les négociations, il est également hors de question de servir des plats à base de choux blanc comme un gratin de chou blanc, un velouté de chou blanc, un parmentier de chou blanc, des feuilletés chou blanc, une potée au chou blanc….

Je sais ce que vous vous dîtes les amis : « alors qu’est ce qu’on a bien pu leur servir à manger à ces politiciens durant ces sommets européens ? Quels menus ont bien pu leur concocter ces fameux chefs cuisiniers ? ». Votre question tout à fait pertinente (mais je n’en attendais pas moins de vous puisque vous êtes mes lecteurs) m’amène ici à formuler une réponse « on ne peut plus clair » : « Je n’en sais rien car je n’y étais pas ». Je n’y étais pas mais je sais que ça s’est bien passé puisque la Grèce a obtenu la coquète somme de 130 milliards d’euros. Il n’y a pas eu de fausses notes dans le menu, les pièges ont été évités et notamment celui du pain ! Bien entendu il fallait du pain ne serait-ce que pour faire prendre conscience aux Grecques que, désormais, ils allaient avoir du pain surla planche. Seulementle pain en question ne devait pas être trop sec sinon les grecques auraient compris que l’Union Européenne et le FMI n’avaient qu’une idée en tête avec eux, les mettre au pain sec. Un casse tête je vous dis. Il était également hors de question de servir du pain blanc (la baguette, le pain de mie) puisque par définition une fois qu’on a mangé son pain blanc, il faut s’attendre à des jours moins heureux, plus laborieux. Alors quel type de pain a-t-on bien pu leur servir ? Ma réponse est une nouvelle fois« on ne peut plus clair » : « Je n’en sais rien car je n’y étais pas ». Peut être ont-ils mangé du pain bio fabriqué à partir de céréales issues de l'agriculture biologique, donc respectant a des critères précis de respect de l'environnement, et identifié par le logo "AB". C’est le genre de pain qui fait saliver les Grecques puisque A et B sont des lettres que les Grecques souhaiteraient obtenir auprès des agences de notation financière. Malheureusement pour eux Moody's vient de leur attribuer un "C", note la plus basse possible de sa classification, aux emprunteurs qu'elle juge à l'orée du défaut de paiement.

Puisqu’on parle finances je me dois de vous rappeler qu’étaient présents à ces repas officiels de nombreux banquiers. En effet l’aide à la Grèce, au-delà du plan de sauvetage de 130 milliards d'euros accordé par ses créanciers publics, c'est-à-dire les états de la zone euro, comportait également un effacement par ses créanciers privés, c'est à dire les banques, de 100 milliards d'euros de dette grecque. Il fallait donc là aussi être particulièrement vigilant au contenu des assiettes de ces chers banquiers. Je suis sûr qu’on ne leur a pas servi de salade car les banquiers détestent qu’on leur en raconte….des salades. Par contre, peut-être leur a-t-on servi des plats à base d’oignons histoire de leur faire comprendre qu’on était aux petits oignons avec eux. En tout cas, ce dont je suis quasiment certain, c’est qu’ils ont eu droit à des desserts aux spéculoos afin de les rassurer. C’était une façon de leur dire qu’ils pourraient continuer de spéculer allègrement sur le dos des Grecques. A moins qu’ils aient eu droit  aux célèbres gâteaux financiers qui demeurent le grand classique pour les banquiers. Je me rends compte qu’on en est aux desserts, que le repas s’achève, et que j’ai omis de vous parler des boissons. Qu’a-t-on bien pu leur servir à boire à tous ces protagonistes ? Selon moi on leur a servi du lait pour que tous, sans exception, soient satisfaits, pour que tous savourent la situation. En effet, ne s’agit-il pas là de la signification de cette fameuse expression « boire du petit lait » ?

 Les amis je me dois d’achever cette chronique par une certitude que j’ai à l’égard de ces chefs cuisiniers auxquels je rends hommage encore une fois car il faut bien reconnaître qu’avec ces repas officiels ils marchent sur des œufs. Bon, je sais très bien que, s’ils en cassent des œufs, ce n’est finalement pas très grave puisqu’ils sauront nous en faire une excellente omelette, mais, ou voulais-je en venir ? Je m’égare. Non ce que je voulais vous dire c’est cette certitude qui conclura cette chronique politico- culinaire et qui pour moi ne fait aucun doute:

 « Les cuisiniers n’ont pas fait déguster leurs cailles farcies au poulet » (2)

 Bon appétit !!

 

(1) « il s’agit pour ces cuisiniers hors pair de ne pas faire d’impairs » : l’expression utilisée par l’auteur dénote chez celui-ci une volonté de faire rimer les mots mais également un penchant pour la roulette, célèbre jeu de casino où l’on peut miser soit sur les chiffres pairs soit sur les chiffres impairs

(2) contrepèterie arrivant comme un cheveu sur la soupe tant pis !

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