Lettre à l'attention du président de la Fédération Internationale de l'Automobile (Jean Todt) à propos du champagne dans la F1

Monsieur le Président, c’est une sieste crapuleuse occasionnée par la retransmission du dernier grand prix de F1 en Hongrie, remporté une fois n’est pas coutume par Lewis Hamilton, qui m’a motivé dans la rédaction de cette lettre à votre attention.

En effet reconnaissez avec moi que le manque de spectacle et notamment de dépassements en piste est fortement préjudiciable à l'attrait des courses de F1. Le constat est accablant : au fil des ans les courses de F1 sont devenues soporifiques. Aussi pour remédier à cela la FIA, dont vous êtes le président depuis 2009, a décidé de supprimer certaines aides électroniques, comme l'antipatinage, afin de redonner une plus grande importance au pilotage. De même ont été imposés le retour des pneus slicks (pneus avec une bande de roulement non rainurée, garants d'une meilleure adhérence) après douze années d'interdiction, de pair avec des modifications aérodynamiques importantes telles qu'un aileron avant plus large et plus bas et un nouvel aileron arrière plus étroit et plus haut.

Je ne crois guère m’avancer en affirmant que tout cela n’a servi à rien. J’irai même jusqu’à dire, excusez-moi l’expression, que la FIA a fait fausse route puisque les courses de F1 sont toujours aussi ennuyeuses.

Alors je sais ce que vous allez me dire : « qu’avez-vous à nous proposer vous qui êtes si malin ? ». L’idée, que je qualifierai de pétillante (1), m’est venue à l’esprit en assistant au podium de ce grand prix. Les pilotes qui terminent sur le podium sont des veinards puisqu’ils repartent après la course avec la coupe des vainqueurs ainsi qu’une belle bouteille de champagne (2). L’idée est donc la suivante : pourquoi ne pas obliger les trois premiers d’une course à consommer la bouteille qu’ils ont gagnée dans l’heure qui précède le départ de leur prochaine course ? Pour être plus concret pourquoi ne pas obliger les trois premiers pilotes du grand prix de Belgique du 2 septembre 2012, dont Lewis Hamilton fera sûrement partie, à consommer la bouteille qu’ils auront gagnée dans l’heure qui précède le départ du grand prix d’Italie du 9 septembre 2012. Ce n’est pas à vous, amateur de bon vin que vous êtes, que je vais apprendre les effets de l’alcool sur la conduite : reflexes diminués, prise de risque, diminution de la perception du danger, inadaptation au changement de lumière, réduction du champ visuel, diminution de la sensibilité à la couleur rouge.

N’avons-nous pas là tous les ingrédients pour redonner aux courses de F1 le caractère spectaculaire auquel elles aspirent ? Les favoris habituels que sont Alonso, Vettel et Hamilton, dont le taux d’alcoolémie serait alors supérieur à 1 gramme par litre, multiplieraient ainsi les fautes de conduite (en freinant ou en accélérant trop tard par exemple) et permettraient par la même à des pilotes inconnus de les doubler et de goûter aux joies du podium. En outre vous donneriez aux courses de F1 un caractère comique non négligeable. Ainsi pour ce qui est du tour de chauffe précédant le début de la course durant lequel les voitures zigzaguent afin de chauffer les pneus, le moins qu’on puisse dire c’est que nos 3 pilotes qui se seront envoyés une bouteille de champagne avant le départ n’auront pas à se forcer pour zigzaguer. Ils les feront naturellement les zigzags. Il est d’ailleurs fort à parier qu’ils adoptent ce type de conduite peu académique même pendant la course compromettant par la même définitivement leur chance de podium. A ma connaissance je n’ai encore jamais vu un pilote de F1 remporter un grand prix en zigzaguant tout le long. D’autre part la consommation d'alcool entraînant un état de somnolence,  j’imagine très bien un Alonso, Vettel ou Hamilton s’endormir durant son arrêt au stand. En général cet  arrêt qui prend environ 4 secondes, le temps de changer les pneumatiques et de mettre le carburant, prendrait ici plusieurs minutes le temps de réveiller le pilote. La situation serait pour le moins coquace et participerait à l’hilarité générale du public. Des records seraient battus, celui du plus long arrêt au stand ! De même que j’imagine très bien un pilote ne pas obéir aux consignes des commissaires de courses exigeant l’interruption de la course. Pourquoi ? Tout simplement parce que le drapeau utilisé pour procéder à l’interruption de la course est rouge mais ce n’est pas à vous que je vais apprendre çà. Or le rouge, comme je l’ai mentionné un peu plus haut, est une couleur à laquelle sont peu sensibles les personnes qui viennent de consommer une bouteille de champagne. J’imagine la scène d’ici, les commissaires décident d’interrompre la course, en raison du temps pluvieux par exemple, ils sortent donc le drapeau rouge, toutes les voitures s’arrêtent sauf celles de nos trois pilotes ayant bu leur bouteille qui, pas plus perturbés que ça de se retrouver seuls en piste, continuent leur petit bonhomme de chemin comme si de rien n’était. Non vraiment y’à pas à dire on rigolerait comme jamais.

Bien entendu si vous avez l’audace de mettre en place cette nouvelle mesure relative au champagne, il conviendra d’être particulièrement rigoureux en faisant souffler dans le ballon les trois pilotes censés avoir consommé leur bouteille. Si leur taux d’alcoolémie n’est pas supérieur à 1  gramme par litre de sang alors ils ne peuvent pas prendre part à l’épreuve.

Alors je sais ce que vous allez me dire : « et la sécurité des pilotes vous en faîtes quoi ? ».

Tout de suite les grands mots, ne montez pas sur vos grands chevaux (3) ! Je vous propose que nous en parlions calmement autour d’un verre, d’ailleurs à ce sujet rien ne nous oblige de prendre une coupe de champagne on peut très bien déroger à la règle en buvant une bonne bière ou mieux encore un bon cognac car comme le dit si bien le proverbe « qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ! ».

En espérant vous avoir convaincu sur cette mesure novatrice, je vous prie de bien vouloir accepter, Monsieur le Président, mes sincères salutations champenoises.

(1)                L’idée en question ayant trait au champagne celle-ci est forcément pétillante. 

(2) La tradition remonte aux origines de la F1avec, Juan Manuel Fangio qui, le 2 juillet 1950, après sa victoire au grand prix de Reims-Gueux,  célèbre son succès, une bouteille de champagne à la main.  L'idée a germé dans l'esprit de deux cousins amateurs de sport automobile et accessoirement célèbres producteurs de champagne : Paul Chandon Moët et Frédéric Chandon de Brailles

 (3) l’expression « monter sur ses grands chevaux » à l’égard de Jean Todt est relativement appropriée puisque ce dernier a été directeur de la Scuderia Ferrari de 1993 à 2007 dont l’emblème initial, est-il besoin de la rappeler,  est un cheval cabré (Cavallino Rampante) noir sur le fond jaune